La recherche scientifique, une solution au retard économique des États d’Afrique francophone ? 

Avec un PIB croissant depuis une vingtaine d’années (Figure 1.) l’Afrique est la deuxième région économique à la croissance la plus rapide, derrière l’Asie. Alors que de nombreuses économies émergentes connaissent un ralentissement, ce continent tire son épingle du jeu avec de nombreuses opportunités de développement.
Parallèlement, compte également une population à croissance exponentielle d’environ 1,2 milliard d’habitants dont la moitié aura moins de 25 ans à l’horizon 2050. Cette jeunesse, si elle était suffisamment armée intellectuellement et techniquement, dans des secteurs clés, pourrait représenter un atout considérable pour la création de richesses permettant de relever les différents défis du continent.

 

Former la jeunesse dans des domaines scientifiques majeurs 

 

La recherche scientifique axée sur les projets qui répondent aux besoins sociétaux, est désormais reconnue comme un moyen d’atteindre les objectifs du développement durable en l’occurrence l’objectif 9.5 dans lequel l’Unesco encourage les gouvernements à davantage investir dans la R-D. Dans une étude récente réalisée pour le compte de l’association des universités de France,  il a été démontré la valeur ajoutée en termes financière et d’emplois de l’investissement dans la recherche scientifique universitaire. 1 euro  dans la R-D, génère un retour sur investissement de l’ordre de 4 euros pour le pays[1].

 

Quel est l’état de la recherche scientifique en Afrique

 

Bien qu’il existe une grande disparité entre les pays, la recherche en Afrique enregistre un retard considérable au regard de la place qu’elle occupe dans la recherche mondiale. Les travaux de recherche menés sur le continent pèse peu en termes  d’articles scientifiques, de brevets et de produits de haute technologie.

 

Selon le rapport 2021 de l’Unesco sur la science, le retard dans production scientifique africaine qui représenterait 1 % de la recherche mondiale serait lié à un retard structurel. Le rapport de même nature publié 2015, indique qu’à lui,  une augmentation du nombre de publications des chercheurs d’Afrique de 60,1 % entre 2008 et 2014 et de 51 % en Afrique subsaharienne. Mais la part des publications de l’Afrique dans le monde n’était que de 2,6 % en 2014 et celle de l’Afrique subsaharienne ne représentait que 1,4 % la même année. Les universités sont à peu près les seules à se consacrer à la production scientifique, axée sur des domaines bien spécifiques : l’agriculture et la santé dominent largement, avec plus de 80 % de la production.

En matière d’innovations technologiques, l’Union Africaine et les Nations Unies, dans un document de travail [2] publié en 2014 relèvent que : – l’Afrique détient 0,8 % des demandes de brevets déposées dans le monde en 2012 et que les trois quarts des demandes déposées étaient le fait de non-résidents ;- les exportations de produits de haute technologie de l’Afrique représentent environ 5% du total de ses exportations de biens dans le monde.

 

La recherche publique en Afrique subsaharienne francophone fait face à des défis majeurs : absence de politiques publiques dédiées, tutelle administrative émiettée, et financements insuffisants, avec moins de 1 % du PIB alloué contrairement à l’objectif de 1 %. Les mécanismes de financement sont inefficaces, manquant de transparence et souvent limités au paiement des salaires, avec peu de soutien pour les projets spécifiques. L’infrastructure de recherche est inadéquate, entravant le développement qualitatif et quantitatif des recherches et contribuant à la fuite des cerveaux. Les structures de valorisation des recherches sont souvent absentes, tout comme les mécanismes de suivi et d’évaluation des programmes de recherche. Les structures de recherche universitaires sont généralement informelles, résultant des efforts individuels plutôt que d’une politique institutionnelle cohérente, ce qui nuit à leur crédibilité. En outre, la recherche privée reste faible, la majorité des activités de R-D étant conduites dans le secteur public : plus de 70 % des  activités de recherche sont exécutées par des organismes de recherche et établissements d’enseignement supérieur publics [2].

 

Quels sont les moyens de développement de la recherche ?

 

Toutefois, si l’on en croit les données récentes, les recommandations de l’Unesco aux états à investir dans la recherche scientifique pour atteindre les objectifs du développement, principalement les objectifs 9 et 16, ainsi que la crise liée au Covid-19, l’on assiste à une prise de conscience des états africains quant à l’importance de structurer et de financer des programmes de recherche qui répondent aux problématiques du continent. Cette prise de conscience entraîne plusieurs répercussions dont une augmentation de la qualité et la quantité des productions scientifiques dans les domaines précédemment cités et une amélioration des capacités de recherche via la création de centres de recherche. Certains pays de la zone francophone, plus particulièrement le Sénégal, en suivant les préconisations de l’AUF dans une analyse récente, ont mis en place une stratégie de recherche et ont entamé un travail de mise en place de synergie entre les chercheurs en les regroupant par thématiques de recherche. Par la suite, vont découler des programmes de recherche nationaux et internationaux (dans la zone Afrique) ciblant des thématiques spécifiques au continent.

1 Economic Contribution of Udice Universities

UNION AFRICAINE/NATIONS UNIES/ CONSEIL ÉCONOMIQUE ET SOCIAL /COMMISSION ÉCONOMIQUE POUR L’AFRIQUE (2014). Innovations et transfert de technologie au service du renforcement de la productivité et de la compétitivité en Afrique. Document de travail, 7ème réunion annuelle conjointe de la Conférence des ministres africains des finances, de la planification et du développement économique de la Commission économique pour l’Afrique et de la Conférence des ministres de l’économie et des finances de l’Union africaine

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